Babacar, un gaillard d’une trentaine d’années, de corpulence impressionnante, ne sait trop comment occuper ses moments de loisir dans cette petite bourgade d’Afrique Noire. Il ne sort guère que pour aller jouer au tiercé. Comme beaucoup d’Africains citadins il joue régulièrement aux courses en espérant, bien sûr, gagner une grosse somme d’argent. Nous nous retrouvons un dimanche soir à prendre un verre dans un petit café du quartier du marché. Dans un coin somnole un vieil Africain. On nous dit que c’est un grand sorcier. Quand il se réveille Babacar s’entretient avec lui en Wolof. Il sort de son sac ses plantes miraculeuses qui guérissent et préservent de tout (il y a bien sûr le pouvoir médicinal des plantes mais là, à voir le regard malicieux du sorcier, je pense qu’on a affaire, au mieux, à de la pure magie). Babacar, très enthousiaste, prend un bout de papier pour noter très scrupuleusement tout ce que le sorcier lui conseille. Quant à moi j’ai droit à une fleur, selon ses dires la plus puissante des plantes porte-chance, à mettre près de mon porte-monnaie pour être sûr de devenir riche.
( Voici la plante au pouvoir magique. Une valeur symbolique ? )
Le lendemain Babacar me montre quelques feuilles de papier blanc qu’il vient d’acheter. Il me dit : «c’est le vieux qui m’a demandé de les acheter, je vais le voir pour qu’il me fasse une protection très puissante». (Les sorciers écrivent des formules ou dessinent des graphes sur un bout de papier qui est soigneusement roulé et enserré dans un tissu, une ceinture, une pochette, un pendentif... ce qui constitue une amulette.) Et il ajoute très sérieusement : «ça va me permettre enfin de gagner beaucoup d’argent, et je serai même protégé contre le fer». Il a dû me voir un peu étonné car il a aussitôt précisé : «oui si quelqu’un veut me donner un coup de couteau la lame ne pénétrera pas dans mon corps, et même si l’on me tire une balle de revolver elle ne pourra pas pénétrer»...